Des patients qui comprennent mal leur médecin, des notices de médicaments parfois trop compliquées… : comment favoriser l’éducation à la santé pour les Wallons ?

La santé est un domaine qui nous concerne tous… mais pas toujours de la même manière. Certaines données chiffrées révélées dans une récente étude des Mutualités libres sont, à ce titre, plutôt inquiétantes.
On y apprend notamment que 40% des Belges sortent du cabinet de leur médecin généraliste en ayant à peu près compris le diagnostic tandis que 17% éprouvent de réelles difficultés à comprendre leur médecin. Parallèlement, les notices des médicaments sont trop compliquées pour près d’un tiers des personnes qui ont été interrogées, de même que les campagnes de santé publique pour un quart des individus sondés.
Des résultats éloquents que j’ai fais suivre à Maxime Prévot, le ministre wallon des Travaux publics, de la Santé, de l’Action sociale et du Patrimoine, par le biais d’une question écrite. Dans mon texte, je lui ai expliqué que « suite à cette mauvaise compréhension, certains patients omettent de se rendre à des examens complémentaires de santé, de prendre leurs médicaments ou encore de faire de suivi via une visite de contrôle ». Cela alors qu’un bon niveau de compréhension influence le déroulement et le succès du traitement.
C’est en effet la Région wallonne qui assume les compétences liées à la prévention et à la promotion en matière de santé. J’ai donc demandé au ministre Prévot s’il pouvait me renseigner quant aux mesures qui seront mises sur pied pour assurer aux Wallons une éducation à la santé via des campagnes de santé publique accessible et si des collaborations avec la Communauté française étant envisagées, par exemple en ce qui concerne la promotion envers les jeunes publics.

La réponse? La voici!

« Les recherches actuelles (http://devsante.org/base-documentaire/education-sanitaire/conditions-pour-quune-consultation-dobservance-soit-plus-educa) nous indiquent que, pour améliorer l’observance (L’observance correspond au degré de concordance existant entre le comportement du patient face à une prescription (traitement, suivi, habitudes de vie) et le comportement souhaité par la communauté médicale.), il est fondamental d’impliquer le patient dans la décision thérapeutique pour qu’elle lui soit compréhensible, qu’il puisse en identifier les bénéfices sur sa santé et consentir à construire avec le soignant les ajustements pour adapter son comportement à son problème de santé.
Selon cette position, l’information seule est insuffisante pour atteindre une meilleure observance chez le patient. Ce dernier doit, en effet, prendre la mesure de la gravité de sa maladie, de son caractère chronique et des changements que cela va entraîner dans sa vie.
L’éducation du patient (http://www.chrcitadelle.be/fr/professionnels-de-la-sante/services-infirmiers-et-paramedicaux/education-du-patient/) s’inscrit dans une approche humaniste des soins au profit des patients, de leurs proches et des professionnels de la santé en institution hospitalière et au domicile. Elle s’inscrit également dans une politique de santé globale et résolument moderne qui considère le patient comme acteur de sa santé qui est en mesure de savoir, de comprendre, d’apprendre, et d’agir pour son bien-être.
Les démarches d’éducation du patient se réfléchissent en objectifs d’apprentissage : objectifs cognitifs, comportementaux et psychomoteurs, autrement dit, en savoir, savoir-faire et savoir-être. Éduquer les patients, c’est les mener vers l’autonomie. À travers une information correcte, il s’agit de leur donner les outils pour comprendre leur pathologie ou l’examen qu’ils doivent subir, il s’agit de les aider à accomplir les gestes adéquats pour maximaliser les effets de leur traitement et enfin les soutenir ainsi que leurs proches pour vivre au mieux avec la maladie.
Une offre d’éducation thérapeutique s’adapte en termes de moyens et de durée aux besoins d’éducation du patient. Elle comprend (http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/etp_-_comment_la_proposer_et_la_realiser_-_recommandations_juin_2007.pdf) :
– une séance individuelle d’élaboration du diagnostic éducatif ou son actualisation pour identifier les besoins et les attentes du patient, formuler avec lui les compétences à acquérir et les priorités d’apprentissage ;
– des séances d’éducation thérapeutique collectives ou individuelles ou en alternance pour l’acquisition des compétences d’auto-soins et la mobilisation ou l’acquisition de compétences d’adaptation, et leur maintien ;
– une séance individuelle d’évaluation des compétences acquises, des changements mis en œuvre par le patient dans sa vie quotidienne et du déroulement du programme individualisé ;
– une coordination des professionnels de santé impliqués dans la prise en charge de la maladie chronique autour et avec le patient.
Si elle a fait ses preuves, l’éducation thérapeutique du patient a aussi montré ses limites : l’approche doit respecter des critères de pertinence, de validité scientifique, de communication, de relation, d’éducation, de méthodologie, de stratégie, de partenariat, d’implémentation, d’éthique.
L’honorable membre le comprendra, des campagnes de santé publique seules ne sont pas efficaces, c’est toute une stratégie de communication, selon le public visé et selon les pathologies visées qui doit être mise en place. Ces campagnes doivent être accompagnées de suivis individuels difficiles à mettre en place par un praticien isolé.
Cette question soulève l’importance du travail multidisciplinaire et en réseau au niveau de la première ligne pour qu’il reste en cohérence avec des campagnes d’information en prévention et en promotion de la santé.
Actuellement, pour les patients, il faut aussi souligner l’importance de la confiance accordée aux praticiens qui est un préalable essentiel à une bonne relation. Ils estiment que la confiance découle d’une bonne communication et d’une bonne expertise (Eurobaromètre étude qualitative, Participation des patients, Rapport complet, Mai 2012, Étude réalisée par TNS Qual+ à la demande de la Commission européenne, Direction générale de la Santé et des Consommateurs. Étude coordonnée par la Commission européenne, Direction générale Communication – DG COMM Unité « Research and Speechwriting » – http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/quali/ql_5937_patient_fr.pdf )
Les médecins généralistes peuvent, en colloque singulier, avoir un impact important sur les comportements futurs de leurs patients en adaptant de façon personnalisée leurs conseils aux patients qu’ils connaissent. Mais, il est vrai que les médecins de première ligne ont trop peu de temps disponible, sont trop peu nombreux, ont beaucoup de travail et que la priorité est de soigner. En conclusion, beaucoup estiment qu’il est nécessaire d’améliorer la communication entre les praticiens et leurs patients, et qu’il faut pour cela avoir plus de temps disponible.
Les patients évoquent la nécessité d’obtenir plus d’informations, par exemple sur leurs maladies et sur les traitements alternatifs. Ils estiment que des informations écrites seraient particulièrement utiles.
N’oublions pas les maisons médicales qui représentent un mouvement pour une société plus solidaire, plus équitable et socialement juste. Ce système de santé organisé à partir des soins de santé primaires, est constitué d’équipes pluridisciplinaires qui cherchent à fonctionner selon un modèle de centre de santé intégré (CSI) qui offre des services variés de santé de façon à globaliser et à simplifier pour le patient, certaines démarches de santé.
Il est bon de rappeler que les campagnes de prévention, notamment médiatiques, ont pour particularité de s’adresser à un très large public là où d’autres types d’actions relevant de la promotion de la santé ne touchent que quelques groupes (éducation pour la santé) voire ciblent les individus (consultation médicale, entre autres).
De larges campagnes médiatiques s’avèrent aussi souvent efficaces, ce qui n’a pas échappé à la plupart des organismes nationaux chargés de la promotion de la santé comme le Centers for Disease Control and Prevention (CDC) aux États-Unis ou l’Inpes en France. Ces derniers mènent régulièrement ce genre d’action de grande envergure, parce que cela marche (http://educationsante.be/article/dossier-campagnes-de-prevention-au-cur-de-levaluation-pourquoi-faire-campagne/).
De nombreuses associations sont subventionnées par la Wallonie pour mettre en œuvre une communication la plus adaptée possible afin d’informer, de sensibiliser et de favoriser des comportements de prévention pour des maladies avec un grand impact tels que certains cancers (encourager le dépistage) ou les maladies sexuellement transmissibles.
Enfin, il existe un protocole de collaboration entre l’ONE et la DGO5 ainsi qu’entre l’ONE et l’AWIPH, lesquels devront être revus à la suite de la 6e réforme de l’État pour former un seul protocole entre l’ONE et l’AViQ cette fois. Ce protocole ne manquera pas d’inclure les aspects liés à la prévention et à la promotion de la santé dans un but de complémentarité et d’articulation cohérente entre la promotion de la santé et la promotion de la santé à l’école. »